Accepter
Kintsugi sur soi.
Ajuster, consolider, et puis donc, quoi ? Je proposais « fortifier » mais si ça me semble une nécessité, ça ne me plait pas d’en faire un souhait pour l’année à venir. L’impression de m’emmurer, disais-je.
J’ai envie de conserver ce « savourer » qui me piquait la langue il y a quelques mois. Il ne va pas être facile, celui-là. Il va à l’encontre de ma nature – de mes réflexes, tout du moins.
LN m’a proposé de venir dîner chez elle samedi prochain et j’ai, dans le même temps, répondu « oui, évidemment ! » et pensé « quitter mon chez-moi, un samedi soir, après une semaine de taf, ça va pas la tête ? » Et c’est à peu près tout ce que m’inspire n’importe quoi qui sorte de l’ordinaire ou des moments où j’estime que ça peut passer (pendant les vacances, en gros.) Alors que, j’adore LN, je ne veux surtout pas la perdre, et quel sens ça a, d’aimer une personne, si on ne la voit pas ?
J’ai peur de tout, on dirait. Pourtant quand je n’ai pas le choix, je fais, et je ne me pose pas de questions, puisque je n’en ai pas le loisir. Et j’apprécie, souvent. Pas assez apparemment pour vouloir réitérer l’expérience, mais tout de même. Et je me demande, non pas à côté de combien d’instants je passe – ça n’a pas plus de sens pour moi que lorsque des gens me disaient que j’avais sûrement raté quelque chose en ne multipliant pas les relations « amoureuses » – mais : est-ce que je ne pourrais pas profiter, aussi, des imprévus et des escapades hors des sentiers battus ?
Ce soir, c’est pareil, et au nouvel an ça l’était aussi : il est bien trop tard et, simultanément, je dépasse mes bornes et je m’en veux. Est-ce que, peut-être, c’est envisageable, de savourer ce que je suis en train de vivre, plutôt que d’appréhender ce que ça suscitera, plus tard ? Et est-ce que ça n’engendrerait pas des sentiments plus agréables, si je ne faisais pas les choses à moitié ?
Il faut dire qu’Angoisse m’a vraiment pourri la vie, ces derniers temps. Elle l’a toujours fait, mais je crois que je la gérais différemment, quand j’étais plus jeune. Je l’ignorais ou je la provoquais. Ça donnait pas des trucs terribles, mais à présent je la regarde du coin de l’œil et je m’incline avant même qu’elle ne se soit déchaînée. Tu vas me dire que j’ai appris à me préserver, ce qui est vrai, mais moi j’ai surtout l’impression qu’elle a gagné et que je vis recroquevillée.
Alors en premier lieu, encore lutter, mais, je sais pas, ça me semble plus sensé, plus agréable même, de m’affronter aux fantômes à l’intérieur de la forteresse que de scruter l’horizon depuis les remparts, au cas où poindraient les étendards ennemis (le fait qu’on puisse conjuguer ce verbe au futur mais pas au conditionnel me rend dingue, je suis désolée.)
Pas d’oubliettes pour Angoisse, je ne le lui souhaite pas plus qu’à moi. Elle restera au château, qu’elle hantera comme elle voudra.
Quelques jours plus tard.
Angoisse est restée au château, et moi aussi. Nous y avons toujours vécu, n’est-ce pas ?
Je voulais vraiment faire cette rentrée correctement. Quand je me suis couchée hier soir, j’avais dix heures de sommeil devant moi. Et ce matin : l’épuisement. Comme samedi, comme l’été d’il y a un an, l’impression d’être au bord d’un précipice et, d’un instant à l’autre, de subir une bourrasque que manque m’y jeter. J’ai l’impression que je vais m’évanouir, mais ça n’arrive pas.
Je suis rentrée chez moi, ou plutôt, Ubik est venu me chercher – ce qui veut dire qu’il va falloir ressortir, ramener la voiture qui est restée sur le parking. Et depuis, je me traîne, du lit au bureau, avec un sentiment tenace de culpabilité qui ne parvient pourtant pas à prendre plus de place que la fatigue ni que l’anxiété.
Je réalise – niaisement, j’en conviens – que savourer possède un corollaire évident : accepter. Accepter ce qui est et comment je me sens, et aussi, pour en revenir à LN, dire oui.
C’est marrant, je crois qu’accepter faisait partie de la liste des « potentiels », en janvier 24. Tout vient à point on dirait, pas à qui sait attendre, juste les choses arrivent quand et comme elles le doivent, j’imagine. Il faudra, à l’avenir, faire attention à ce que ce qui doit ne s’avère pas : maladie ou à tout le moins santé en vrac, car c’est ce qui me pend au nez, ce qui m’arrive déjà, en fait. Accepter qu’il va me falloir réparer alors, à commencer par l’immense faille ouverte en décembre.
6 commentaires
Hier, dernière journée de vacances, j’ai senti crescendo ma poitrine s’écraser sous un poids de plus en plus lourd, les sens en alerte, la respiration coupée. J’ai scanné en revue mes déclencheurs habituels sans que les pièces de puzzle se mettent en place. Et soudain, j’ai capté : demain, c’est la reprise. Mon corps a tiré la sonnette d’alarme des heures avant que je m’en rende compte.
J’ai lu ce matin que 95% des décisions que l’on prend sont inconscientes. Ce chiffre me paraît dingue et pourtant fait tellement sens.
Juste deux échos en moi en lisant ton article.
Prends bien soin de toi <3
Merci ♥
Je te crois sur parole, enfin, je ne sais pas si je comprends bien ce que cela veut dire, cette histoire de décisions inconscientes. En tout cas il semble en effet qu’on ait l’impression d’en prendre certaines alors que le corps et l’esprit ont déjà dit non, bien en amont :)
Prends soin de toi également ♥
Oh oui de la colle réparatrice en or pour combler les fissures, ça rend les choses cassées tellement jolies ♥
Je sens parfois qu’une sorte de force me pousse à dire au peu de sorties que je peux avoir, j’ai envie et pas envie en même temps, je me sens tiraillée et c’est tellement plus facile de rester chez soi. Il n’y a pas de dangers, ni d’efforts à faire. Malgré ma perte des codes sociaux, je sais pourtant que je dois dire oui. Je dois me lancer, me contraindre, et au final, j’en ressors assez contente. J’espère que ce soir tu pourras te reposer de cette journée et que celle de demain sera meilleure.
p.s : mais oui, ça poindre ne peut se conjuguer qu’à certains temps, je n’avais jamais fait attention… mais qui a décidé ça ? 🤔
Ça me rassure énormément de n’être pas la seule à me faire des montagnes de ces sorties, et de les trouver de plus en plus difficiles (en tout cas, il me semble que tu l’avais évoqué sur ton blog). Merci beaucoup de me rappeler ce point commun à chaque fois, et de le partager si librement ♥
ps : mais oui, c’est énervant !
« je crois que je la gérais différemment » C’est tellement juste, je m’y retrouve. Je faisais tout avec une angoisse effrayante, mais je faisais. Maintenant je la laisse souvent dire « non », je ne sais pas ce qui est le mieux ^^’
Bref, je comprends tellement.
♥