Ancrage [Miscellanées de mai]
« Avalé par l’espace au fond d’un entonnoir. »
3 mai
Ça fait cinq jours que j’ai quitté l’hosto, j’entame tranquillement mon congé maladie – parce qu’on va pas se mentir, je suis pas mourante, seulement convalescente. Ça me fait penser à toutes les fois où, gamine, j’imaginais que je venais d’être adoptée, ou alors que je me réveillais amnésique : le même émerveillement (qui n’était pas du tout fake, dans mon souvenir, seulement rassurant.) J’ai rien d’autre à faire que de redécouvrir ma maison et regarder les oiseaux enchanter mes journées. J’ai fini Le Père Goriot, le 29 avril, c’est de ça, et des autres romans que j’évoquerai, dont je voulais parler sur le Bazzart, ça viendra.
Je me déplace encore très peu, moins parce que j’ai mal que parce qu’on m’y autorise. Analepsie. Encore mieux que le confinement.
(Analepsie, subst. fém. Méd. Retour à la santé après une maladie. J’adore découvrir des mots en cherchant des synonymes.)
Sur France Culture, ils diffusent Germinal en feuilleton, adapté pour la radio. C’est pas franchement marrant, mais c’est vachement bien.
5 mai
Recevoir des livres dans ma boîte aux lettres (commandés à la librairie locale puisque que bon, j’ai pas le droit de sortir) et lire les trois quarts du dernier Paula Hawkins en une après-midi.
Et comme il est beau, le premier tome de Blackwater !
Je finis Celle qui brûle le 6, et Dans les brumes de Capelans, le dernier Olivier Norek, le 7. J’aimerais bien que ma vie ressemble à ça tout le temps. Maintenant que j’ai repris le taf, je pense à l’émission Grand bien vous fasse diffusée aujourd’hui (24 mai), où ils parlaient de Montaigne, et où ils disaient que ce dernier soignait sa tristesse dans sa bibliothèque.
Le 9 mai, je finis le premier tome de Bérénice Libretti, un roman de Magali Lefebvre qui m’a déçue, mais j’étais contente de découvrir son travail (j’aime beaucoup Magali Lefebvre.)
10 mai
C’est l’anniversaire de sœurette. Je voudrais pas la trahir, mais elle vient d’atteindre l’aiguille des 35, et ça me fait bizarre de penser que ça fait belle lurette qu’elle n’est plus ma « petite » sœur.
Je découvre l’œuvre de Paola Grizi et suis très désappointée qu’elle ne vende pas ses sculptures, quand bien même ça doit faire de bons attrapes-poussière (et que je n’aurai sans doute jamais les moyens de les acheter.)
13 mai
C’est l’anniversaire de papa. Il a 72 ans, je trouve ça un peu dingue. Maman en avait 59 quand elle est morte. Il semblerait qu’au-delà tout me semble sursis. Mon dieu / mère Nature / quel que soit votre nom, gardez-le en vie encore un peu, s’il vous plaît.
J’ai fini Blackwater (Michael McDowell), ça ne m’a pas trop plu au début, mais je vais acheter la suite.
20 mai
Je retrouve mes élèves après sept semaines ! C’est, clairement, une des journées les plus gratifiantes de mon existence. À part ce moment, pendant un atelier d’écriture, en seconde :
Cyprien chantonne.
Juliette : mais tu connais que des trucs de daron, toi !
Cyprien : « Dans la vallééééé hoho de Dana dadidala… » C’est Manau, madame.
Moi : oui j’ai reconnu, merci… De la musique de daron… La vache, le coup de vieux que je viens de prendre !
J’AI L’ÂGE D’AVOIR DES GOSSES EN SECONDE PUTAIN !!!
21 mai
Mu et moi nous sommes baignées. Sans combi. 13°6. WIIIIITNEEEESS !
Bon. Il est temps de vous parler de ma passion pour Elsa. (c’est son anniversaire, Nostalgie lui a consacré un sujet – oui j’écoute Nostalgie, je suis VIEILLE (mais j’écoutais déjà Nostalgie quand j’avais dix ans.)
24 mai
La cinquième dont je suis la prof principale s’est prise pour une élite oligarque en mon absence. Certains ont DOUZE mots dans leur carnet – douze depuis le début du trimestre, je veux dire. La discipline et moi-même devions leur manquer puisqu’ils observent un silence religieux depuis que j’ai rempli les convocations en colle.
Pendant ce temps-là, ma remplaçante aux abonnés absents m’a renvoyé les copies du brevet blanc, non corrigées, par Colissimo. Youpi, j’ai 90 copies à me farcir en ce long weekend.
26 mai
Vu au mois de mai :
Ça. Je ne. Comprends pas. Comment fait ce film pour ne PAS me faire peur.
The nun. En réalité je l’ai fini hier alors que je l’avais commencé le 19, parce que c’était super nul mais que d’une manière ou d’une autre ça m’a assez accrochée pour que je sois curieuse de voir où ça allait. Corin Hardy, acteurs, vous avez fait de votre mieux, mais James Wan avait fumé la moquette.
Massacre à la tronçonneuse (le nouveau, hein.) Film pas top en terme de scénario mais dont j’ai aimé les personnages, notamment Sally Hardesty, qui apparemment selon les mauvaises langues n’était là que pour le fan-service. Comme je le disais à Maloriel : ouais, évidemment, une femme de plus de soixante ans, à quoi veux-tu qu’elle serve à part au fan-service, elle devrait agoniser à moitié folle dans un asile, elle a de loin dépassé l’âge de nous faire rêver. Bande de connards. Les personnages féminins sont très cools dans ce film, et c’est extrêmement rare dans un film de serial-killer, normalement ils ne servent qu’à exciter les petits mecs pervers. Ce Massacre nouvelle gén’ montre, pour la première fois ou presque, des femmes qui affrontent leur tortionnaire et dépassent leur peur. Tout ça m’a paru tout à fait gâché par la fin, aussi absurde qu’exaspérante, mais c’est pas pour autant que le reste était nul, bien au contraire. D’habitude, les slashers n’attisent que notre voyeurisme, puisque les personnages n’ont aucun intérêt. Ce n’était pas le cas ici et rien que pour ça, je défendrai celui-ci.
27 mai
Ubik a tout rebranché dans « la salle multimédia » et nous y avons regardé notre premier film ensemble depuis plus de trois ans. On a vu The Meg et passé un très bon moment, tant parce que le film était chouette que parce que la pièce est agréable et que c’était cool de se vautrer sur les coussins pour mater un film tous les deux.
Aujourd’hui j’ai fini Notre part de nuit. J’aimerais que tous les romans que je lis comptent autant de pages, parce que j’ai pas envie d’en sortir.
Je suis pas si désolée que ça, mais je vais te laisser sur Bernard Lavilliers déclamant La ballade des Pendus, parce que c’est putain d’extraordinaire (j’aurais tellement aimé voir une vidéo !) (petite obsession pour Lavilliers ces derniers jours.)