Autumn leaves
Un peu d’ambre et de brume pour se préparer au sommeil.
Cette année, je ne fléchirai pas. C’est la promesse que je me répète telle une prière quand, comme ce soir, j’ai froid. À cette heure, les ténèbres s’entrouvrent encore sur la clarté orpiment que diffusent les lampadaires, et qui prend des teintes sépia à mesure qu’elle se dilue, conférant au décor une allure de souvenir bientôt dévoré par la nuit d’une mémoire défaillante.
Le vent, que cet automne languissant a trop longtemps contenu, secoue les arbres. On dirait qu’une poigne invisible s’acharne sur les branches encore feuillues, avec une certaine hargne. La maison craque de toutes parts. J’aime qu’elle le fasse : bien que neuve, elle me ressemble. Avec sa façade vitrée que nulle paupière ne vient fermer, elle se tient debout, persécutée par la tempête. Mais à l’intérieur, il fait chaud. À l’intérieur, il y a des plaids, des bougies, une guirlande, un chat, et de la musique.
À cette heure, me reviennent des émotions bien plus que des images. Elles sont teintées de mélancolie, mais pas de nostalgie ni d’amertume. Au contraire, elles sont douces. Il fait bon s’y lover, comme derrière les rideaux que je ne possède pas. Je me sens vivante au creux de ces nuits orageuses où la pluie se mêle aux mélodies.
L’image du phare m’a habitée sous de multiples formes, ces dernières années. Tantôt fanal, tantôt symbole de stabilité, je le vois aujourd’hui concrétisé tant dans cette maison que beaucoup trouvent imparfaite que dans mon propre corps.
Il y aurait tant à dire, d’ailleurs, de cette dernière assertion, car je dis corps mais j’entends esprit, et je sens pourtant que désormais c’est la même chose.
J’ai sondé mes tréfonds, et je connais par cœur la carte de mes souvenirs. Je sais quels désirs les Démons croient pouvoir combler, et je sais qu’ils sont venus parce qu’une part de moi voudrait leur céder.
J’y pense souvent, à ces mots que j’ai prêtés à Eurydice, l’héroïne de ma fanfic DAI. Cette fanfic qui s’ouvre sur cette phrase : « Je suis un phare », et dont j’ai commencé la rédaction en 2018.
Eurydice, celle de la mythologie, est morte deux fois, d’ailleurs. La première, d’une bête morsure de serpent. La deuxième, d’avoir été regardée avec amour, mais au mauvais moment. Les psychanalystes auraient des tas de choses à conclure de mon amour pour cette histoire, j’en suis sûre.
*
Et donc, le phare (ce serait malhonnête de parler d’écriture automatique concernant ce genre de billet, vu le temps que je passe à les fignoler, mais je ne touche pas au fil de mes pensées, d’où leur aspect un poil foutraque.) (J’hésite à garder cette note, comme la précédente, et puis on verra bien : cette version-là, aussi esthétisée demeure-t-elle, est aussi bien plus franche.)
… Et donc, le phare (pfiou.) Le soir que j’ai passé à tâtonner dans Midjourney suite à la lecture du billet d’Eliness, j’ai vite épuisé mes possibilités gratuites. Depuis, me hantent les arcanes majeurs qu’il me reste à dévoiler.
Depuis quelques… années, je réfléchis au moyen de cartographier les lieux récurrents de mes rêves et cauchemars. Midjourney, auquel je prendrai un abonnement dès que j’aurais un peu plus de temps à y consacrer, m’a offert une autre possibilité, celle de leur donner vie, ainsi qu’aux Figures rencontrées au fil du temps. Je n’ai pas pensé au phare ce soir-là, et j’ai gaspillé beaucoup trop d’images à tenter de comprendre le fonctionnement du logiciel, mais je suis tout de même parvenue à faire émerger quelques visions. Autant te dire que je suis d’accord avec Eli, j’ai été émue.
Donc, la v1 est toute de lave et de ciels embrasés, et dans la v2, le firmament s’apaise et un chemin apparaît, vers un temple ou un volcan éteint… Après donc m’être fait tirer les cartes par une IA un brin bouddhiste et bien trop au courant de ma personnalité, j’ai retenu cette image :
Après quoi je me suis extasiée sur la compréhension innée que l’IA avait des mots et de la ponctuation (ou de son absence) :
Puis j’ai commencé à lui demander de dessiner mes rêves.
Cette année, je ne fléchirai pas, parce que j’ai des talismans plein les poches* et des rêves qui brûlent. Après tout, Novembre est déjà presque achevé. Le plus dur reste à venir, je sais bien, mais on verra un jour après l’autre.
Je suis un phare, ou j’en ai un auquel retourner. On verra.
My fall in the scene where we tried to sleep
And drop from the sky when we wanted to dream
As all the cities are drowned in delight
As dark blue sky is cut from above
Try my faith
* Réminiscence d’un vieux billet que je ne peux retrouver maintenant, perdu dans une base de données verrouillée…
6 commentaires
Trop bien que de découvrir tes résonances et la façon personnelle dont tu as enveloppé tes introspections avec Midjourney :) J’aime toujours autant lire cette sensation d’apaisement, d’alignement interne que tu projettes. Cela m’intrigue beaucoup de lire ta lutte face à l’arrivée de l’hiver, là où je ressens le contraire : un soulagement des retrouvailles avec ces lumières douces et tamisées intérieures. Puissent-elles t’apporter de plus en plus de réconfort !
Et chouette de voir Torul en conclusion, ça me donne envie d’en découvrir davantage d’eux ! (je ne connais que Saviour of Love qui tourne régulièrement dans mes oreilles ^^)
Mes introspections bloguesques tiennent aussi de la méthode Coué ;)
Je suis persuadée que je vivrais mieux l’hiver si je pouvais effectivement rester à l’abri des lumières tamisées… Mais pour moi, l’hiver c’est juste ce moment où je vis la nuit. Ce sont les trajets en voiture qui m’usent le plus. Je pars de chez moi, il fait nuit, je rentre chez moi, il fait nuit (là j’exagère encore mais ça va arriver vite !) Entre les deux, il y a les néons criards et les pauses vapote sous la pluie :)
Merci Spotify pour Torul :)
“The quiet transition from autumn to winter is not a bad time at all. It’s a time for protecting and securing things and for making sure you’ve got in as many supplies as you can. It’s nice to gather together everything you possess as close to you as possible, to store up your warmth and your thoughts and burrow yourself into a deep hole inside, a core of safety where you can defend what is important and precious and your very own. Then the cold and the storms and the darkness can do their worst. They can grope their way up the walls looking for a way in, but they won’t find one, everything is shut, and you sit inside, laughing in your warmth and your solitude, for you have had foresight.”
― Tove Jansson, Moominvalley in November
Les Moomins ont bercé mon enfance ♥
Merci !!!
Toujours aussi impressionnée par les résultats de Midjourney… j’avoue avoir peur de franchir le pas et de me laisser aspirer (je pense pouvoir y passer des heures !) mais ça viendra.
Ton article est très doux et il me fait du bien en ce dimanche soir… Je te souhaite une bonne semaine à venir !
Bah, quand tu auras épuisé les possibilités gratuites, tu feras peut-être comme moi : « bon, bah, je reprendrai plus tard… »
Cinq mois plus tard…
:)
Merci en tout cas, c’est je l’avoue ce que j’essaie de partager dans ce genre de billet, un peu de douceur. Ça me fait plaisir d’être désormais capable de procurer un peu de sérénité, plutôt que seulement ce que je faisais si bien avant (colère, anxiété, blablabla… ;))