Miscellanées de février
Février a commencé par cette question que des collègues ont dû poser aux BTS : « QUI a peint le chat en bleu ? »
Littérature
Au début du mois, j’ai fait passer les oraux blancs de première. C’est comme ça que j’ai découvert ces deux poèmes sublimes, La maison natale de Yves Bonnefoy et Mors de Victor Hugo. C’est assez étrange parce que j’ai toujours pensé que les mots, parce qu’ils ont une définition précise, surpassaient les images ou les sons en termes de sens. Mais en écoutant les analyses linéaires des élèves d’Anne, j’ai été éberluée de me rendre compte qu’elle et moi ne comprenions pas du tout le texte de la même façon.
Je m’éveillai, c’était la maison natale
L’écume s’abattait sur le rocher,
Pas un oiseau, le vent seul à ouvrir et fermer la vague,
L’odeur de l’horizon de toutes parts,
Cendre, comme si les collines cachaient un feu
Qui ailleurs consumait un univers.
Je passai dans la véranda, la table était mise,
L’eau frappait les pieds de la table, le buffet.
Il fallait qu’elle entrât pourtant, la sans-visage
Que je savais qui secouait la porte
Du couloir, du côté de l’escalier sombre, mais en vain,
Si haute était déjà l’eau dans la salle.
Je tournais la poignée, qui résistait,
J’entendais presque les rumeurs de l’autre rive,
Ces rires des enfants dans l’herbe haute,
Ces jeux des autres, à jamais les autres, dans leur joie.
« La maison natale », Les planches courbes, Yves Bonnefoy.
Je vis cette faucheuse. Elle était dans son champ.
Elle allait à grands pas moissonnant et fauchant,
Noir squelette laissant passer le crépuscule.
Dans l’ombre où l’on dirait que tout tremble et recule,
L’homme suivait des yeux les lueurs de la faulx.
Et les triomphateurs sous les arcs triomphaux
Tombaient ; elle changeait en désert Babylone,
Le trône en l’échafaud et l’échafaud en trône,
Les roses en fumier, les enfants en oiseaux,
L’or en cendre, et les yeux des mères en ruisseaux.
Et les femmes criaient : — Rends-nous ce petit être.
Pour le faire mourir, pourquoi l’avoir fait naître ? —
Ce n’était qu’un sanglot sur terre, en haut, en bas ;
Des mains aux doigts osseux sortaient des noirs grabats ;
Un vent froid bruissait dans les linceuls sans nombre ;
Les peuples éperdus semblaient sous la faulx sombre
Un troupeau frissonnant qui dans l’ombre s’enfuit ;
Tout était sous ses pieds deuil, épouvante et nuit.
Derrière elle, le front baigné de douces flammes,
Un ange souriant portait la gerbe d’âmes.
« Mors », Les contemplations, Victor Hugo.
Musique motivante
Windir – Destroy – 1184
Cette batterie ! Ce passage à partir de 3min18 ! Quand j’écoute ça dans ma voiture (tout le temps), je me sens puissante et enthousiaste. 4min38, c’est le moment où je peux triompher d’absolument tout.
Blutengel – Nobody’s diary
Aux premières notes de synthé, je savais déjà que ce morceau très très kitch, très très cheap et très 80’s rejoindrait ma capsule temporelle 2021, parce que j’aime tellement ces sonorités, qui me réconfortent depuis l’adolescence.
Joies enfantines
Lundi 8 février, il a neigé !
Le lendemain, le lycée a fermé, et l’est resté jusqu’au lundi suivant. Bonheur absolu !
Une série dépaysante
La cité invisible, c’est une série brésilienne hyper intrigante. Les créatures d’un folklore dont je ne sais rien s’invitent dans un récit dont la modernité m’a fait beaucoup de bien. Féminisme et homophobie y sont traités en filigrane, juste un détour, par-ci par-là, d’une justesse dingue, sans préjugé ni assertion. Même le discours écologiste, forcément majoritaire vu le pitch (au point que je qualifierais cette série de fantasy écologiste) se contente d’être… là. Cette série nous montre quelque chose, c’est tout. Pas de morale, pas de vérités, juste des gens. J’ai adoré, et j’espère très fort une saison deux.
« Le Curupira (prononciation portugaise : [kuɾuˈpiɾɐ]) est une créature mythologique du folklore brésilien. […]
Son nom provient de la langue tupi, kuru’pir, signifiant « couvert d’ampoule ». Selon la légende culturelle, cette créature aurait des cheveux orange clair, et ressemblerait à un homme ou un nain, mais ses pieds sont tournés en arrière. Le Curupira vivrait dans les forêts brésiliennes et utiliserait ses pieds retournés pour créer des empreintes menant à son point de départ, ceci rendrait les chasseurs et les voyageurs confus. » Wikipédia.
Voilà le genre de créatures qu’on y croise. Trop cool, non ?
12 février
Une photo de Maman envoyée par son frère.
J’avais pourtant dit que cette année, je voulais qu’on me foute la paix :)
En fait, j’étais contente. Et fière. D’avoir un oncle qui va exhumer cette photo de ses archives alors qu’il l’a à peine connue, sa sœur. D’avoir toute une famille qui galère à communiquer parce qu’on parle français, néerlandais et suédois (et finnois !) Bref, une famille qui baragouine de l’anglais chaque fois que c’est nécessaire, sans hésiter, et qui se serre les coudes. Pendant longtemps, je n’ai pas su que j’avais ça !
En vrac
J’ai beaucoup aimé cet article sur Dawson, qui explique pourquoi les figures masculines y étaient inspirantes.
Évidemment, j’ai adoré quand le Fossoyeur a répondu à cette question : « un écrivain ou un poète que tu aimes particulièrement ? » et que je savais au fond de mes tripes qu’il dirait : Alain Damasio. Je n’en suis qu’au début de La horde et pour moi ce sera sans doute toujours La zone du dehors, mais j’ai trop aimé les Camera Obscura, trop intimement aimé, pour avoir des doutes sur les confluences qui « nous » unissent, le Fossoyeur et moi. Je ne le connais pas, on n’aurait rien à se dire, mais quand il a parlé de ce livre qui te sort le cœur de la cage thoracique… Ça ne pouvait être que Damasio, non ?
Balade
Il y a quelques jours, je suis allée me promener au bord du Trieux. On a tellement de chances d’avoir une rivière qui traverse la ville ! J’adore aller flâner sur la passerelle, c’est tellement apaisant.