Octobre
Il y a quelque chose de frissonnant dans la dernière syllabe d’Octobre, bien plus que dans celles de Septembre, novembre ou décembre. Peut-être parce que le ‘o’ est ouvert et laisse entrer les courants d’air, ou parce qu’on trébuche sur le ‘t’.
Ou alors c’est peut-être juste parce que je suis triste, enfin, fatiguée ; non, triste, parce que j’écoute de la musique triste, mais je ne crois pas, en fait : tout ça c’est toujours la faute d’Octobre. Enfin… Je suis triste parce que je suis fatiguée et je suis fatiguée parce que c’est Octobre, tu vois. Je suis émotive, j’ai envie de pleurer, si j’allais me coucher ça irait mieux demain, mais c’est bien aussi, d’avoir envie de pleurer, c’est bien de se réintégrer. Au bout de cinq semaines de cours je ne suis plus moi-même tu comprends, enfin si, je suis pas toujours agréable avec les élèves, ceux qui le méritent, hein, c’est pas dans mes habitudes d’envoyer chier les gens gratuitement, faut m’avoir cherchée, mais bref, quoi qu’il en soit, aussi cassante puis-je me montrer et sans regrets j’insiste, je ne suis pas moi. Je suis un genre de siphon : j’attire toutes les rancœurs et les angoisses des ados (c’est mon rôle), les confidences de collègues qui ont besoin d’évacuer (c’est une malédiction) et je m’étrangle par réflexe dans le flot des trucs à faire, cette marée montante que je m’inflige toute seule faute d’être capable de tenir la distance.
Tous les ans c’est la même tempête, je commence à m’y repérer. Je prends des trucs à bras-le-corps mais toujours en retard (les tas de copies) ; ceci dit c’est quand même vachement moins le bordel, j’ai fixé des prises dans les murs et je m’y tiens. Par contre j’ai tendance à m’éparpiller, je viens seulement de ranger le linge propre depuis le weekend dernier et – non, pas « et ». Parce que – j’ai passé beaucoup trop de mon temps libre dans Baldur’s Gate 3.
Début de semaine, je me pointe à Ker-butun (point de ralliement des fumeurs de Saint-Do. « Butun » = tabac en breton ^^). Il y a du monde, et les gens sont fatigués, eux aussi. Alors ça parle beaucoup, ça grince, ça m’interpelle (c’est gentil, c’est pour m’inclure dans la conversation), et là j’ai réalisé : c’est trop. Je peux pas me tenir droite, étendre ma conscience dans toutes les directions, soigner-rassurer-gronder-sourire-assembler pendant trois à cinq heures si dès le matin je suis assaillie de voix qui récriminent. Du calme. Je voudrais du calme, du silence et des rires.
Évidemment (il faudra pardonner le côté décousu de ce billet, j’aurais dû indiquer les dates et en faire un « Écriture à la petite semaine »), ce que je récolte en ce mercredi soir, c’est ce vers quoi le cycle m’emmenait : une bière à la main et Cyborg Attack, très fort. Ça me soulage tellement que j’ai envie de pleurer.
On s’est engueulés, avec Ubik, et puis réconciliés, parce qu’on s’aime et surtout qu’on se comprend. Ça aussi, ça me donne envie de pleurer.
« La dissolution est le processus physico-chimique par lequel un soluté incorporé dans un solvant (…) forme un mélange homogène appelé solution. » (Wikipédia)
Soluté : 1. Remède liquide contenant une substance en solution.
2. Corps dissous dans un solvant.
La solution est dans le problème, quoi.
Remarque, franchement, ces définitions me conviennent très bien. Je me sens assez cynique pour faire un parallèle alcool (remède liquide) et solvant (moi). Et c’est pas la peine de venir me dire que l’alcool n’est pas une solution et blablabla, la moitié des gens que je connais sont drogués qui aux somnifères, qui aux anxiolytiques, et je ne parle que de ceux qui comme moi sont assez en manque de reconnaissance et/ou j’men-foutistes pour le mentionner en public.
Cela dit, je veux bien admettre que de toute évidence, je suis d’humeur trop mordante pour bloguer.
Octobre, le huitième mois, celui qui dessine le symbole de l’infini, celui où il faut parer la maison de lumières, parce qu’elle s’enfonce dans les ténèbres. Me vient en tête Alien et son huitième passager. Il y a de ces gestations mortifères, dans ces moments où je sombre. La seule différence, non des moindres, c’est qu’après avoir explosé, je ne meurs pas. Je me reconstruis. Le mélange n’est pas très homogène, c’est le moins qu’on puisse dire, mais à défaut de solution, il offre bel et bien une résolution.
4 commentaires
Octobre explose et dure longtemps, comme son infini, malgré la tonne de travail qui tombe dessus, je ne le vois pas avancer dans le temps. J’aimerais mieux que le temps s’étire quand le temps est beau et les moments bons. La (mauvaise) journée d’hier m’a semblé durer le double du temps normal.
La solution est dans le problème, vrai mais pas toujours facile de la (re)trouver à travers les méandres du dit-problème.
Perso, j’ai plutôt un problème avec Novembre d’habitude mais là j’ai l’impression que ça a déjà commencé…
Remèdes : pleurer, oui. Chanter très fort, oui aussi !
Moi aussi d’habitude c’est plutôt Novembre (espérons qu’il n’y aura pas de doublons ^^)
Les méandres, c’est exactement ça : impression de se cramponner physiquement comme mentalement pour remonter le fil, ça peut s’avérer épuisant.
Alors chantons en pleurant, oui !
Prends bien soin de toi ♥
Tellement, tellement épuisant…
Déjà que je chante plutôt faux, au départ, si je pleure en même temps, j’imagine même pas le chaos ^^
:D